vendredi 25 novembre 2005

Louis Braille

Louis Braille, né le 4 janvier 1809 à Coupvray (près de Paris), mort le 6 janvier 1852, est l'inventeur du système d'écriture Braille pour personnes atteintes de cécité ou malvoyantes.

Son père, Simon-René Braille, était un fabricant de selles et harnais. À l'âge de trois ans, Louis fut blessé à l'œil gauche par une alêne provenant de l'atelier. La blessure s'infecta et l'infection, s'étendant à l'œil droit, provoqua la cécité.

À l'âge de dix ans il gagna une bourse de l'institut royal des jeunes aveugles de Paris.

À l'école, les enfants apprenaient à lire sur des lettres en relief mais ne pouvaient pas écrire parce que l'impression était faite avec des lettres cousues sur le papier.

À l'âge de treize ans il invente le système des points en relief inspiré par la visite du capitaine à la retraite Charles Barbier qui avait amené un système d'écriture de nuit permettant aux militaires d'échanger les ordres silencieusement. Ce système de Serre est basé sur douze points, tandis que celui de Braille l'est sur six. Braille a ensuite amélioré son système pour inclure la notation mathématiques et de musique.

Braille mourut de tuberculose. Sa dépouille mortelle fut transférée au Panthéon de Paris.

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Un accident auquel on doit le Braille

Le père de Louis Braille exerçait le métier de bourrelier du village, fabriquant des harnais, des sacs et des courroies de cuir. Déjà tout petit, Louis Braille manifesta un vif intérêt pour le maniement des outils. À partir du jour où il sut marcher et dès qu’il en avait l’occasion, il se glissait dans l’atelier de son père et commençait à y jouer. Mais, un jour de sa troisième année, alors qu’il faisait des trous dans un morceau de cuir avec un outil beaucoup trop lourd et gros pour lui, celui-ci lui échappa et vola droit dans son œil. Ses parents firent tout ce qu’ils purent même s’il n’y avait pas grand chose à faire excepté de bander l’œil atteint. Cependant, Louis, ne pouvant s’empêcher de gratter, augmenta l’infection qui finit par contaminer l’autre œil. Sa capacité visuelle diminua aux deux yeux et finit progressivement par s’éteindre. Il avait beau demander et redemander à ses parents quand reviendrait le matin, il avait été définitivement décidé que jamais plus il ne devait revoir la lumière du jour… Or, à cette époque, les aveugles n’étaient pas aussi bien considérés qu’aujourd’hui : certains les traitaient vraiment comme une race à part entière !… Louis Braille ne suivit donc pas d’instruction excepté les notions que lui inculquaient ses parents. Comme son accident ne lui avait pas fait passer l’envie de travailler le cuir, il s’y adonna de tout son cœur, ce qui, probablement, l’aida à développer son habileté manuelle, évidemment très utile. Ses parents, qui savaient tous deux lire et écrire, se rendaient bien compte que le savoir du travail du cuir ne suffisait pas à un enfant pour bien vivre plus tard. Son père obtint alors, nul ne sait comment, l’admission de son fils à l’Institution Royale des Jeunes Aveugles, école fondée auparavant par Valentin Haüy. Dès son entrée à l’institution, Braille apparut comme un élève de premier ordre. Il réussissait dans toutes les disciplines enseignées et raflait toutes les récompenses, qu’il s'agisse de tâches manuelles ou de travaux intellectuels. Braille n’avait pas encore quinze ans qu’on lui confiait déjà certaines responsabilités d’enseignement. On lui attribua de plus en plus de fonctions de toutes natures à l’Institut.

Son invention

C’est aux alentours de 1819 que Louis Braille apprit l’existence de Charles Barbier et de son invention. Immédiatement il voulut y apporter quelques améliorations ! Malheureusement une grande différence d’âge séparait les deux inventeurs et, malgré son succès à l’Institut, personne ne fit attention à Louis. D’autre part Barbier, qui avait un caractère entier, n’a jamais accepté que l’on touche au principe de son invention : représenter des sons et non l’alphabet. Le dialogue n’a pas dû être facile entre le jeune écolier et l’inventeur chevronné et sûr de lui ! Cela n’a pas empêché Braille de poursuivre la mise au point de son propre système, auquel il travaillait avec acharnement, surtout le soir et la nuit. Après quelque temps, son travail fut presque au point, vers 1825. C’est en 1827 (Braille avait 18 ans) que cette écriture reçut pour la première fois la sanction de l’expérience : la transcription de la «grammaire des grammaires». En 1829 parut, imprimé en relief linéaire qui était encore l’écriture officielle à l’institution, l’ouvrage intitulé Procédé pour écrire les paroles, la musique et le plain-chant au moyen de points, à l’usage des aveugles et disposés pour eux, par Louis Braille, répétiteur à l’institution Royale des Jeunes Aveugles. On peut dire que c’était le «véritable acte de naissance du système braille». Ce premier alphabet n’était pas exactement celui que nous connaissons mais sa partie principale - les quatre premières séries - était la même qu’aujourd'hui ; il comportait, outre les points, un certain nombre de traits lisses qui ont rapidement disparu. Dans son exposé, Braille décrit la «planchette » et le «stylet» mais ne dit pas comment réaliser les traits lisses. On ne connaît pas les règles que Braille s’est fixées pour établir la première série de signes, dont les autres découlent. Ce que l’on sait, c’est que Braille a été très attentif à écarter les signes qui auraient pu prêter à confusion car trop proches les uns des autres. Malgré ses défauts de jeunesse, ce système était d’ores et déjà supérieur à celui de Barbier, ce qui d’ailleurs n’a pas dû lui plaire. Le plus grand avantage du système de Louis est que c’était un alphabet, calqué sur celui des voyants. Il donnait donc un accès réel et complet à la culture. Il était beaucoup plus facile à déchiffrer car ses caractères étaient de moitié moins hauts (au maximum 6 points au lieu de 12) et pouvaient être facilement appris à tout aveugle. De plus, il demandait très peu d’entraînement, sans déplacement du doigt. Bien que Barbier ait toujours refusé de se déjuger, il a cependant reconnu la valeur de la méthode de Braille, ce qui encouragea ce dernier à apporter des innovations à son écriture, telle que la notation musicale ponctuée qui est devenue de nos jours ce que l’on nomme la «Notation musicale braille internationale». Par la suite, l’emploi du braille ne fit que se développer mais il fallut plus de vingt-cinq ans pour qu’il soit officiellement adopté en France. Malheureusement, comme toujours lorsqu’une invention novatrice prend son essor, il y a quelquefois des reculs. Il y eut, entre 1840 et 1850 une sorte de «crise du braille» à la suite du renvoi et de la mise à la retraite prématurée d’un maître de l’Institut qui avait fortement soutenu Braille, accusé de corrompre la jeunesse par l’enseignement de l’histoire. Son successeur commença par essayer de limiter l’usage du braille à la musique. Il n’y réussit pas vraiment et, finalement, à partir de 1847, le braille reprit son ascension, preuve que l’on ne pouvait plus se passer de lui…

La disparition d’un homme remarquable

C’est vers 1835 que les proches de Braille ont pu remarquer qu’il commençait à être sujet à des quintes de toux de plus en plus régulières. À cause de cela, on allégea petit à petit ses tâches de professeur, ne lui laissant à partir de 1840 que ses leçons de musique. Il décida alors lui-même, en 1844 d’abandonner définitivement l’enseignement. Il profita de son temps pour essayer de donner encore plus d’ampleur à son travail et inaugura en 1847 la première machine à écrire le braille. Cependant, c’est dans la nuit du 4 au 5 décembre 1851 qu’une hémorragie abondante du poumon l’obligea à cesser toute activité. Alité, de plus en plus affaibli par des hémorragies successives, il mourut le 6 janvier 1852 d’une tuberculose, en présence de ses amis et de son frère, après avoir reçu l’extrême onction. Il fut inhumé le 10 janvier à Coupvray, selon la volonté de sa famille. Il fallut attendre un siècle pour que la dépouille mortelle de Louis Braille, bienfaiteur de l’humanité, rejoigne enfin, au Panthéon, les plus grands des personnages français. Il fut cependant décidé de laisser, en hommage à son village d’enfance, ses mains inhumées dans sa tombe à Coupvray…

Le mot de la fin

Lorsque l’on évoque le nom de Braille, que plus personne n’ignore, ce qui vient immédiatement à l’esprit de tous, c’est évidemment l’écriture ponctuée qui porte son nom. Très peu de personnes, même parmi celles qui s’intéressent au sort des aveugles, savent que Braille ne s’est pas reposé sur ses lauriers après l’avoir mise au point. Il restait en effet un problème important que le braille ne résolvait pas : celui de la communication entre aveugles et voyants, qui avait été une des préoccupations majeures de Valentin Haüy. On ne pouvait évidemment pas demander que le braille soit enseigné dans les écoles des voyants, même si cette écriture ne présentait aucune difficulté d’apprentissage pour qui utilisait ses yeux et non ses doigts. C’était aux aveugles de se mettre à la portée des voyants et Louis Braille en était parfaitement conscient. Mettant une fois de plus en action son imagination et son intelligence, il inventa une méthode nouvelle qu’il exposa en 1839 dans une petite brochure imprimée en noir, intitulée : «Nouveau procédé pour représenter par des points la forme même des lettres, les cartes de géographie, les figures de géométrie, les caractères de musique, etc., à l’usage des aveugles». En gros, cette méthode était basée sur un repérage, par coordonnées, de points en nombre suffisant pour permettre d'une part la reconnaissance visuelle de lettres, chiffres et autres signes des voyants, d’autre part leur reconnaissance tactile par les aveugles.

Source : Wikipedia

lundi 21 novembre 2005

Pierre Joseph Proudhon

Pierre Joseph Proudhon

Pierre Joseph Proudhon (né le 15 janvier 1809 à Besançon (1) dans le Doubs, mort à Paris (2) le 19 janvier 1865 à Passy), économiste, sociologue français, théoricien du socialisme, considéré comme un des premiers penseurs anarchistes.

La publication en 1840 de son œuvre maîtresse Qu'est-ce que la propriété ?, question à laquelle il répondra par "c'est le vol", suscitera l'attention des autorités judiciaires et celle de Karl Marx qui débutera alors une correspondance avec Proudhon, et le défendra contre Bauer dans La sainte famille. Les deux hommes se sont influencés mutuellement; ils se sont rencontrés lorsque Marx était en exil à Paris. Leur amitié cessera avec la réponse cinglante que Marx fera au livre de Proudhon La Philosophie de la Misère, réponse qu'il intitule La Misère de la Philosophie. Leur dispute est une des origines de l'opposition entre anarchistes et marxistes.

Dans son livre Les confessions d'un révolutionnaire, Proudhon affirmera entre autres choses : « L'anarchie c'est l'ordre ».

Après avoir tenté de créer une banque de prêts gratuits (à taux zéro), il pose les fondements d'un système de mutuelles dont les principes sont encore appliqués de nos jours dans les assurances.

(1) A noter qu'il existe une rue Jean-Baptiste-Victor Proudhon (dont il est un lointain cousin) juste en face la rue Pierre Joseph Proudhon, mais finalement, très peu de Bisontins se rendent compte de la différence de prénoms de ces deux rues !

(2) Pierre-Joseph Proudhon est enterré à Paris, au cimetière du Montparnasse (2ème division, près de l'allée Lenoir, dans la tombe de la famille Proudhon).

Vie et œuvre

Pierre-Joseph Proudhon et ses enfants, gustave Courbet, 1865.

Biographie de Proudhon (par H. Bourgin, La Grande Encyclopédie, 1916)

Proudhon (Pierre-Joseph), né à Besançon le 15 janvier 1809, mort à Passy le 16 janvier 1865. Ses parents étaient de très humbles gens, de souche paysanne, qui restèrent toujours pauvres ; pendant qu'ils peinaient eux-mêmes dans leur modeste brasserie, lui travaillait aux champs, ou gardait les vaches. À l'âge de douze ans, il obtint de la bienfaisance d'un protecteur une bourse d'externe au collège de Besançon : il étudia avec passion et sans méthode : il avait une érudition considérable et une intelligence éveillée sur tout quand il passa, vers dix-neuf ans, de l'école à l'atelier : il entrait, en 1828, dans une grande imprimerie de Besançon, où il devint bientôt correcteur. Là il apprit encore : les ouvrages de théologie et de patrologie, qui passaient le plus souvent sous ses yeux, firent de lui un théologien ; il apprit l'hébreu, et, par cette voie, s'aventura dans la grammaire comparée. Sa critique trouvait à chaque instant une occasion de s'exercer ; ses idées bouillonnaient déjà ; ses ambitions s'élevaient au-dessus de sa condition d'ouvrier ; il attendait impatiemment le moment de produire quelque chose ; ses amis espéraient beaucoup de lui, et ne le lui cachaient pas. En 1831-32, il fit son tour de France, par Paris, Lyon, Marseille, Toulon ; il chôma plus d'une fois, connut le besoin, se sentit supérieur à son état, observa la société de près et sans indulgence, devint républicain. De retour à Besançon, des offres lui furent faites par le journal phalanstérien l'Impartial : il les refusa, pour conserver son indépendance et l'entière disposition de sa pensée. Après un nouveau voyage à Paris et un second tour de France (1833), il quitta, en 1836, la place qu'il occupait depuis huit ans, pour fonder, à Besançon même, avec deux associés, une petite imprimerie : il ne leur apportait d'autres capitaux que son intelligence et ses travaux projetés. Le premier prêt fut un Essai de grammaire générale qu'il ajouta, sans le signer, aux Éléments primitifs des langues, de l'abbé Bergier (1837) : essai très ingénieux et très érudit de grammaire comparée de l'hébreu, du grec et du latin, enrichi de digressions sur l'histoire de l'humanité, mais construit avec des hypothèses, et dépourvu de fondement scientifique. C'était une publication très honorable, mais elle ne fut suivie d'aucune autre. L'imprimerie périclita rapidement, et, cette même année 1837, la folie de l'un des associés en causa la fermeture immédiate, suivie d'une lente et difficile liquidation.

Proudhon dut se tourner ailleurs : d'abord il reprit ses études, et bientôt une occasion s'offrit à lui d'en tirer parti en les continuant. La pension instituée à l'Académie de Besançon par la veuve de Suard en mémoire de son mari, et en faveur du jeune littérateur reconnu par l'Académie comme le plus digne dans le département du Doubs, devint vacante : c'était une rente de 1500 francs pendant trois ans ; Proudhon posa sa candidature, et, après s'être fait recevoir bachelier, condition indispensable, il fut choisi. En 1838, il alla s'installer à Paris, où, sous la direction de M. Droz, son tuteur, il devait préparer des ouvrages qui fissent honneur à l'Académie ; mais ce devoir fut vite oublié. Il n'avait formellement promis à l'Académie qu'une chose, c'est de travailler à l'amélioration matérielle et morale de ceux qu'il appelait ses frères, les ouvriers ; l'économie politique, sur laquelle se porta alors toute sa pensée, lui révéla sa tâche. Il chercha dans les bibliothèques et dans les cours publics toutes les parcelles qu'il pouvait recueillir de cette science de l'avenir ; et, en même temps qu'il étudiait, il faisait la critique de ses maîtres, orateurs et écrivains, il élaborait les parties et les morceaux de théories nouvelles : dès le début de 1839, il songeait à écrire un gros livre sur la question de la propriété. Il en fut momentanément distrait par deux travaux académiques : dans le premier semestre de 1839, il envoya à l'Académie des inscriptions et belles-lettres un mémoire où il reprenait les idées contenues dans son Essai de grammaire, et, à l'Académie de Besançon, une pièce de concours sur l' Utilité de la célébration du dimanche ; il jugeait cette pièce révolutionnaire, parce qu'il y entremêlait de vagues théories égalitaires une paradoxale interprétation de la [loi mosaïque] ; l'Académie n'infirma pas son jugement, mais, tout en déclarant l'auteur audacieux et parfois dangereux, lui accorda une médaille de bronze.

Un pareil succès ne pouvait contenter Proudhon : il se résolut de frapper un grand coup avec son ouvrage sur la propriété, qu'il publia en 1840, sous ce titre : Qu'est-ce que la propriété ? ou Recherches sur le principe du droit et du gouvernement. Passant en revue les différentes théories présentées jusqu'alors pour établir le droit de propriété, il les réfutait l'une après l'autre, et concluait que la propriété ne pouvait être fondée ni sur l'occupation ni sur le travail, qu'elle était immorale, injuste, impossible. En dépit de cette thèse violente et saisissante, l'ouvrage n'atteignit pas le grand public, la vente en fut restreinte : et déjà Proudhon, impatient d'attendre le succès, préparait un second volume pour compléter sa thèse, lorsque, enfin le premier attira l'attention du pouvoir, qui faillit poursuivre l'auteur, et de l'Académie de Besançon, qui condamna publiquement son pensionnaire et ne s'apaisa qu'après l'avoir fait comparaître à plusieurs reprises devant elle, et après avoir entendu ses explications. Cependant le second volume était achevé ; il parut en 1841 sous la forme d'une Lettre à M. Blanqui, professeur d'économie politique. Il fournissait la confirmation du premier mémoire ; Proudhon y insistait sur l'idée que la société a déjà porté plusieurs atteintes sur la propriété, et qu'elle doit continuer son œuvre par la restriction progressive de l'intérêt. Il fallut, cette fois, que Blanqui intervînt auprès du ministre de la justice pour empêcher des poursuites ; mais le gouvernement prit sa revanche sur une brochure de polémique que Proudhon publia en 1842 pour répondre aux phalanstériens, l'Avertissement aux propriétaires : la brochure fut saisie, et l'auteur cité devant la cour d'assises de Besançon : il présenta lui-même sa défense, dont la dialectique et l'idéologie, volontairement obscures, enlevèrent l'acquittement aux jurés, qui n'avaient pas compris.

Ce procès convainquit Proudon qu'il n'y avait pas de réformes à attendre du gouvernement réactionnaire de Louis-Philippe ; il abandonna les questions d'application immédiate pour les questions de philosophie générale, de science économique et de méthode, auxquelles il crut donner une solution complète et définitive dans son livre De la création de l'ordre dans l'humanité, exposition assez laborieuse et mal faite de l'évolution sociale depuis la religion jusqu'à la science, et de la méthode de groupement « sériel » destinée à remplacer l'ancienne [Syllogisme|logique syllogistique]] (1843). Cependant sa librairie de Besançon venait d'être vendue, il quittait une place de secrétaire qu'il avait chez un légiste de Paris ; après avoir sollicité en vain une petite fonction administrative à Besançon, il obtint un emploi important dans une grande maison de transports fluviaux à Lyon ; il y prit la connaissance du grand commerce, de la grande banque, des grandes entreprises, et il y trouva assez de loisirs pour continuer, en toute liberté d'esprit, ses études d'économie politique. Le résultat de ces études fut la publication, en 1846, après deux années de labeur, du Système des contradictions économiques : il y appliquait la méthode antinomique à l'économie, et s'efforçait de dégager les contradictions qu'en renferment tous les phénomènes : valeur, division du travail, concurrence, crédit, propriété ; il se contentait de reporter à un ouvrage ultérieur le système de solutions on de synthèses qu'appelait ce système de contradictions. Mais il ne tarda pas à se rendre compte que des traités comme ceux qu'il avait publiés jusqu'ici, tout en lui valant l'estime des savants et des professeurs, ne faisaient point à ses idées de popularité dans le public : il se décida à fonder un journal et à répandre par livraisons la solution du problème économique qu'il avait formulé. Le premier numéro spécimen du Représentant du peuple parut le 14 octobre 1847, et le second le 15 novembre. Mais la Révolution devança tous les projets qui s'y trouvaient indiqués.

Le 24 février 1848 posa toutes les questions : Proudhon se vit forcé d'y répondre plus tôt qu'il n'avait compté. Dans le Représentant du peuple, dans ses deux livraisons de la Solution du problème social (22 et 26 mars), qui ne furent suivies par aucune autre, dans les brochures où il reprit ses articles du Représentant : «Organisation du crédit», «Résumé de la question sociale», il mit en avant des idées très nettes : la solution du problème social est seulement dans l'organisation du crédit mutuel et gratuit ; la solution du problème politique est dans la restriction progressive du gouvernement jusqu'à l'établissement de l'anarchie; la démocratie du suffrage universel n'est qu'une fausse image du pays ; il faut établir une république sans constitution et sans limitation de la liberté individuelle. Au bout de trois mois, Proudhon avait acquis par le journal et par la brochure une place parmi les chefs du parti socialiste ; il fut élu le 4 juin à l'Assemblée nationale pour le département de la Seine. Il forma, presque à lui seul, à l'extrême gauche, un groupe distinct de la Montagne, et fut sans action sur l'Assemblée, qu'il déroutait ; sa proposition en faveur d'un impôt d'un tiers sur le revenu fut ignominieusement repoussée et flétrie (séance du 30 juillet) ; dès lors il se tut. Mais, au dehors de l'Assemblée, son énergie n'était pas brisée ; son journal le Peuple (novembre 1848 à juin 1849) reprit avec vaillance l'œuvre du Représentant, également violent contre les bourgeois, les réactionnaires, les démocrates, le prince-président, contre lequel ses attaques répétées finiront par lui valoir trois ans de prison ; il se sauva en Belgique, et, comme il repassait par Paris pour se rendre en Suisse, il fut saisi et incarcéré. Cet emprisonnement mit fin à ses projets de crédit mutuel (Banque d'échange, devenue Banque du peuple), mais non à son œuvre politique. De Sainte-Pélagie, où il jouissait, du reste, d'un régime de faveur, il dirigea la Voix du peuple (octobre 1849 à mai 1850), et le Peuple de 1850 (juin à octobre 1850) ; il publia à un fort tirage les Idées revolutionnaires (recueil d'articles du Représentant et du Peuple), et les Confessions d'un révolutionnaire (1849), remarquable exposition de sa politique révolutionnaire et anarchique ; puis, l'Idée générale de la révolution au XIXe siècle (1851), où sont présentées ensemble et combinées ses théories politiques et économiques ; enfin il prépara, pour la publier peu après sa libération (1854), la Révolution sociale démontrée par le coup d'État, appel à Louis-Bonaparte pour l'achèvement de la Révolution, qui devait être son œuvre.

Ainsi, de politicien et de polémiste, Proudhon était devenu presque exclusivement historien et théoricien. Marié depuis 1849, père de deux petites filles, rudement frappé par les épreuves de la vie politique en France depuis quatre ans, il avait résolu de renoncer à l'action, de se consacrer à des travaux de science et de philosophie, d'élever enfin une œuvre positive à la place des doctrines que sa critique avait jetées par terre depuis plus de dix ans. Un petit opuscule sur la Philosophie du progrès, dont la vente ne fut pas permise en France, indiqua son Programme (1851, publié en 1853) ; et, presque aussitôt, des projets de travaux, nombreux et divers, dont la plupart n'aboutirent pas, le détournèrent de ce programme pour plusieurs années ; il travailla presque à la fois à un cours d'économie politique, à une biographie générale, à une chronologie générale, à un projet d'exposition perpétuelle au Palais de l'Industrie (1855), projet dans lequel il reprenait une partie de ses idées sur l'échange et le crédit ; rien de tout cela ne vit le jour ; il publia seulement deux ouvrages spéciaux et presque techniques, un Manuel du spéculateur à la Bourse (1853), et un traité sur la Réforme des chemins de fer (1855), en faveur de l'abaissement des tarifs et du contrôle des compagnies par l'État. Alors, il revint à son plan de 1853 ; à partir de 1856, il travailla sans arrêt à un grand ouvrage où il voulait donner à la révolution sa philosophie et sa morale, qu'il fit tenir dans la justice, en opposant à la révolution l'Église, qui nie et combat la justice. Mais, à peine parue (1858), la Justice dans la Révolution et dans l'Église fut saisie, l'auteur poursuivi devant la cour d'assises de la Seine, et condamné à trois ans de prison et 4.000 fr. d'amende. Après de vaines tentatives pour faire réformer cet arrêt par les tribunaux ou par le gouvernement, Proudhon prit le parti de se retirer à Bruxelles (juillet 1858), où sa famille vint le retrouver au bout de quelques mois. Son énergie, d'abord un peu diminuée par l'exil et par le spectacle de la réaction croissante en France, lui revint bientôt tout entière, et il reprit son activité. Cette même année 1858, il publia dans l'Office de publicité, à Bruxelles, des articles contre la propriété littéraire ; l'année suivante, il se mit à préparer une réédition de la Justice, considérablement augmentée, et un gros ouvrage sur la Guerre et la Paix (paru en 1861), où il justifie le droit de la force comme un droit primordial de l'humanité, considère la guerre comme une conséquence des maux économiques et du paupérisme, et en fait prévoir l'élimination dans la société future fondée sur le travail. Un concours dans le canton de Vaud, en 1860, lui offrit une occasion de revenir aux sujets purement économiques, et sa Théorie de l'impôt, qui eut le prix à ce concours (1861), puis ses Majorats littéraires, réédition remaniée de ses articles de l'Office de publicité (1862), précisèrent sa position nouvelle de critique radical en théorie, et de conservateur réformiste dans la pratique. Il commençait un grand traité doctrinal et historique sur la propriété quand, de nouveau, la politique le détourna de l'économie sociale.

Cette fois, ce fut la politique extérieure. La question de l'unité italienne était alors débattue par la diplomatie et par l'opinion de l'Europe entière : Proudhon prit résolument parti contre l'unité, en faveur de la fédération, dans des articles qu'il donna à l'Office de publicité (1862). Un passage de ces articles, mal compris des Belges, le fit passer pour un agent annexionniste au service de Napoléon III ; il y eut autour de sa maison un commencement d'émeute, et il se vit forcé de regagner précipitamment la France, où l'amnistie de 1859 n'avait pu le décider à rentrer. De retour à Paris, il développa ses idées fédéralistes, et les exposa complètement dans son Traité sur le Principe fédératif (1863), qui le ramenait aux questions de politique intérieure. Il se montra très favorable à la reconstitution d'un parti démocratique solidement uni, mais en même temps il recommanda l'abstention aux élections de 1864, en guise de protestation formelle contre le gouvernement de l'Empire (Les Démocrates assermentés ; 1863). En 1864, il publia dans le Messager de Paris de Nouvelles observations sur l'unité italienne, et acheva le manuscrit de la Capacité des classes ouvrières, sorte de manuel pratique de la politique fédéraliste et abstentionniste. ll mourut l'année suivante, de maladie de cœur et de congestion.

Il laissait de très nombreux ouvrages inédits, plus ou moins achevés, sur les matières les plus diverses d'économie politique, d'histoire, de morale, de politique, de littérature et d'art ; il en a été publié une partie dont les plus remarquables, avec la Capacité politique, sont : Théorie de la propriété (1866), en faveur de la réforme de la propriété par sa généralisation et par l'institution d'un système de garanties ; Théorie du mouvement constitutionnel (1870), critique des constitutions françaises depuis 1789, d'où se dégage l'idée de la supériorité d'un État décentralisé ; Du principe de l'art (1875), un plaidoyer pour la peinture réaliste et pour l'art social de l'avenir. Proudhon a aussi laissé une correspondance extrêmement précieuse, qui a été recueillie en 14 vol. in-8 (1875).

Philosophie politique

Le "premier anarchiste"

Il y eut de nombreuses personnes avant lui à s'opposer aux autorités, mais il est le premier à se qualifier d'anarchiste dans sa thèse (Qu'est-ce que la propriété ?) publiée en 1840, sous la forme d'un dialogue:

« Eh! pouvez-vous le demander, répond sans doute quelqu'un de mes plus jeunes lecteurs; vous êtes républicain.

-Républicain, oui ; mais ce mot ne précise rien. Res publica, c'est la chose publique ; or quiconque veut la chose publique, sous quelque forme de gouvernement que ce soit, peut se dire républicain. Les rois aussi sont républicains.

- Eh bien! vous êtes démocrate ?

-Non.

-Quoi! vous seriez monarchiste ?

-Dieu m'en garde.

-Vous êtes donc aristocrate ?

-Point du tout.

-Vous voulez un gouvernement mixte ?

-Encore moins.

-Qu'êtes vous donc ?

-Je suis anarchiste. »

Auparavant le terme anarchiste servait à insulter la Gauche durant la Révolution française, il désigne depuis Proudhon la philosophie politique anarchiste.

La propriété c'est le vol

Selon Proudhon, de même que l’esclavage c’est l’assassinat de l’homme, la propriété c’est le vol. Si, écrit-il dans Qu’est-ce que la propriété ? (1840) : »tel auteur enseigne que la propriété est un droit civil, né de l'occupation et sanctionné par la loi"; si "tel autre soutient qu'elle est un droit naturel, ayant sa source dans le travail"; lui prétend "que ni le travail, ni l'occupation, ni la loi ne peuvent créer la propriété, qu'elle est un effet sans cause".

Proudhon affirme que le propriétaire capitaliste, en payant le travail des ouvriers, paye "autant de fois une journée qu'il a employé d'ouvriers chaque jour, ce qui n'est point du tout la même chose". Ainsi il a fallu quelques heures à deux cents grenadiers pour dresser l'obélisque de Louqsor sur la place de la Concorde, "suppose-t-on qu'un seul homme, en deux cents jours, en serait venu à bout ?".

La production est le résultat de l'utilisation de la force collective du travail et non de l'addition des forces individuelles des travailleurs. C'est la force collective qui permet le surplus d'énergie, et c'est le propriétaire capitaliste qui s'attribue ce surplus d'énergie. La propriété capitaliste, selon Proudhon, c'est le droit de jouir du travail des autres, c'est le droit de disposer du bien d'autrui. C'est pourquoi la propriété c'est le vol. Selon Proudhon, il y a donc entre l'ouvrier qui reçoit le salaire de sa journée de travail et le propriétaire capitaliste qui s'empare du produit de la force collective auquel l'ouvrier a participé une erreur de compte. C'est pourquoi "le travailleur conserve, même après avoir reçu son salaire, un droit naturel de propriété sur la chose qu'il a produite". Il s'en suit que le travailleur a droit, dans la proportion de son travail, à la participation des produits et des bénéfices. L'existence de la propriété capitaliste a pour conséquence une situation économique et politique désastreuse. Du point de vue économique la propriété capitaliste conduit à l'exploitation du travailleur en effectuant une retenue sur son travail productif, et donc en limitant sa consommation au profit d'une minorité d'oisifs (les rentiers). Du point de vue politique la propriété capitaliste conduit à l'inégalité des droits et au triomphe de la raison du plus fort. Est-ce à dire qu'il faille substituer la communauté des biens à la propriété capitaliste. Proudhon ne le pense pas car pour lui la communauté des biens est injuste et oppressive. Elle est injuste car elle permet l'exploitation du fort par le faible, en récompensant de même manière le paresseux et celui qui travaille, en récompensant de même manière la bêtise et le talent. La communauté des biens est oppressive parce qu'elle enchaîne par "une uniformité béate et stupide ... la personnalité libre, active, raisonneuse, insoumise de l'homme ...".

Qu'elle est la solution ? La solution c'est la possession. La propriété capitaliste doit être remplacée par une possession individuelle, transmissible et susceptible d'échange, cette possession "ayant pour condition le travail, non une occupation fictive, ou une oisive volonté". Cependant, dans son ouvrage posthume La Théorie de la propriété (1866), Proudhon constate que : "... le peuple, même celui du socialisme, veut, quoi qu'il dise, être propriétaire ..." et il pense qu'en définitive la propriété individuelle, absolue et incoercible, peut assurer la protection des faibles contre l'Etat. Car c'est l'Etat l'ennemi véritable du citoyen.

Mais l'on ne saurait confondre cette propriété individuelle avec la propriété capitaliste, celle des rentiers, car cette propriété individuelle est fondée sur le travail associatif, c'est une "propriété fédéraliste". La propriété n'est acceptable que dans la mesure où elle permet l'usus et non pas l'abusus.

L'ennemi principal c'est donc l'Etat. C'est la raison pour laquelle Proudhon est hostile à l'Etat, pour l'anarchie et pour la révolution.

Le gouvernement de l'homme par l'homme c'est la servitude

Si l'exploitation de l'homme par l'homme dans la propriété capitaliste c'est donc le vol, selon Proudhon "Eh bien ! le gouvernement de l'homme par l'homme, c'est la servitude" (Les Confessions d'un révolutionnaire, 1850). Le gouvernement démocratique n'est pas épargné : "L'erreur ou la ruse de nos pères a été de faire le peuple souverain à l'image de l'homme. Et dire qu'il y a parmi nous des démocrates qui prétendent que le gouvernement a du bon ; des socialistes qui soutiennent au nom de la liberté, de l'égalité et de la fraternité cette ignominie ; des prolétaires qui posent leur candidature à la Présidence de la République !". Selon lui le suffrage universel est une :"...institution excellente pour faire dire au peuple non ce qu'il pense, mais ce qu'on veut de lui"(Le Peuple, 1848).

Finalement Proudhon préférerait encore la monarchie traditionnelle à la démocratie capitaliste, car :"Religion pour religion, l'urne populaire est encore au-dessous de la sainte ampoule mérovingienne. Tout ce qu'elle a produit a été de changer la science en dégoût et le scepticisme en haine"(De la Justice dans la Révolution et dans l'Eglise, 1858). C'est que Proudhon s'oppose à toute autorité imposée, à celle de l'Eglise comme à celle de l'Etat. Et il n'entend pas que le peuple soit soumis à une nouvelle religion, quelle qu'elle soit. Voilà pourquoi il s'oppose au marxisme, dans lequel il voit une nouvelle religion dogmatique et intolérante :"Ne nous faisons pas les chefs d'une nouvelle religion, cette religion fut-elle la religion de la logique, la religion de la raison"(Lettre à Karl Marx du 17 mai 1846).

Pour un ordre volontaire

Est-ce à dire que Proudhon est contre toute forme d'ordre ? Absolument pas. Proudhon est pour une certaine forme d'ordre. Proudhon est, pour un ordre volontaire : "Je veux aussi l'ordre, autant et plus que ceux qui le troublent par leur prétendu gouvernement, mais je le veux comme un effet de ma volonté, une condition de mon travail et une loi de ma raison. Je ne le subirai jamais venant d'une volonté étrangère, et s'imposant pour conditions préalables la servitude et le sacrifice".

Proudhon est donc contre l'ordre de l'Etat, qui est un ordre militaire, qui a pour but de "maintenir avant tout la féodalité capitaliste dans la jouissance de ses droits ; assurer, augmenter la prépondérance du capital sur le travail ; renforcer, s'il est possible, la classe parasite, en lui ménageant partout, à l'aide des fonctions publiques, des créatures, et au besoin des recrues ; reconstituer peu à peu et anoblir la grande propriété"(L'Idée générale de la Révolution au XIXème siècle, 1851).

Ce que veut Proudhon c'est un ordre qui, sans la force coercitive, remène à l'unité la divergence des intérêts, identifie le bien particulier et le bien général, efface l'inégalité naturelle des facultés par l'égalité de l'éducation. Proudhon veut un ordre dans lequel chaque individu :"soit ... producteur et consommateur, citoyen et prince, administrateur et administré ; où sa liberté augmente toujours, sans qu'il soit besoin d'en aliéner jamais rien ; où son bien-être s'accroisse indéfiniment ...". Cet ordre ne sera pas un ordre politique, selon Prouhon, mais un ordre économique basé sur l'autogestion et la fédération.

La révolution anarchiste sera donc économique : c'est la révolution économique qui permettra de réaliser la justice sociale de l'anarchie par l'autogestion fédéraliste. ( L’utopie anarchiste a toujours ses « supporters » : par exemple le cinéaste britannique Ken Loach réalisateur notamment de Land and freedom sur la guerre d’Espagne (1995)).

La Justice fédéraliste

La Justice fédéraliste selon Proudhon c'est l'antithèse de la justice de l'Eglise catholique : "L'ancien monde était complet : il avait sa théologie, sa philosophie, son économie, sa politique, sa morale ... Où la révolution n'est rien, ou elle doit remplacer tout cela, c'est à dire reconstruire la société au complet. La justice pour moi régit tout : la cité et la famille, l'économie, le travail, les lettres mêmes et l'art. L'Eglise, organe de la pensée religieuse, est le foyer de l'ancien monde ... L'ordre humain dépend de la manière dont la justice est comprise et interprétée, soit par l'Eglise soit par la révolution"(De la Justice, 1858).

La justice de la révolution, selon Proudhon, c'est le fruit de cette faculté que possède l'homme, grâce à sa raison, de sentir sa dignité dans la personne de son semblable comme de sa propre personne. La justice c'est donc :"Le respect spontanément éprouvé et réciproquement garanti, de la dignité humaine, en quelque personne et dans quelque circonstance qu'elle se trouve comprise, et à quelque risque que nous expose sa défense".

Plus concrètement sans doute la justice sociale c'est l'égalité et l'équilibre dans la liberté. En effet les hommes sont égaux :"Tous les individus dont se compose la société sont en principe de même essence, de même calibre, de même type, de même modèle ; si quelque différence entre eux se manifeste, elle provient non de la pensée créatrice qui leur a donné l'être et la forme, mais des circonstances extérieures sous lesquelles les individualités naissent et se développent".

La justice c'est cette égalité de l'homme individu qui est préservée par l'équilibre des forces sociales. Car les forces sociales doivent être égales, afin d'être équilibrées, de façon que les unes n'écrasent pas les autres et que donc l'égalité individuelle, c'est à dire la liberté individuelle, soit préservée.

L'égalité c'est la liberté

En effet, selon Proudhon, l'égalité c'est la liberté. C'est parce que l'homme est l'égal de l'homme qu'il est son propre juge, et qu'il se constitue en autorité vis-à-vis de lui-même. Il ne peut y avoir de liberté si l'autorité est extérieure à l'homme. Il ne peut y avoir de liberté que si l'homme est son propre maître. C'est pourquoi la devise de l'anarchie est "ni Dieu ni maître". C'est la raison pour laquelle la justice de la révolution ne peut être que la justice de l'autogestion fédérative, la justice du mutualisme et de la coopération.

Mutualité et coopération

L'économie sera autogérée dans le cadre d'institutions mutualistes et coopératives résultant de la conclusion de contrats synallagmatiques et commutatifs, avec des obligations réciproques et égales. Les hommes se grouperont volontairement en s'obligeant réciproquement les uns envers les autres et en s'engageant à donner ou faire une chose qui est regardée comme l'équivalent de ce que l'on fait pour eux.

Ainsi seront constituées des unités de production et de distribution qui passeront entre elles des contrats destinés à régir leurs rapports. Ces unités se regrouperont volontairement pour constituer des unités autonomes dans les différents domaines de l'activité humaine : industries extractives, manufacturières, commerciales, agricoles, des lettres, sciences et arts. Le regroupement volontaire des unités autonomes donnera naissance à une Fédération agricole-industrielle qui sera chargée de gérer tous les services publics. La politique, c'est à dire l'administration générale, sera autogérée de même manière.

Vers une Fédération mondiale

Politiquement les hommes se regrouperont volontairement, par le contrat mutualiste, dans des communes qui s'associeront volontairement dans le cadre de provinces, qui s'associeront elles-mêmes pour constituer une fédération politique, c'est à dire un Etat fédératif.

Cet Etat fédératif, afin de ne pas devenir oppressif, ne devra pas dépasser une certaine taille. C'est la raison pour laquelle Proudhon écrit que :"L'Europe serait encore trop grande pour une Confédération unique : elle ne pourrait former qu'une Confédération de Confédérations"(Du principe Fédératif, 1863).

L'Etat fédératif a : "un rôle de législation, d'institution, d'inauguration, d'installation ... de premier moteur et de haut directeur ... d'organe principal du mouvement social ...". Ce rôle est joué par l'Assemblée nationale des députés des unités fédérées, Assemblée nationale qui élit une commission exécutive à elle subordonnée.

Mais attention, le pouvoir de cet Etat fédératif ne peut être coercitif puisqu'il émane de l'association volontaire d' hommes égaux donc libres. Le pouvoir de l'Etat fédératif est fondamentalement un pouvoir de coordination dirigeante qui laisse les unités de base exécuter librement. L'Etat fédératif autogéré ne peut donc être comparé à l'Etat français de son époque, l'Etat napoléonien, un Etat centralisé, hiérarchisé et autoritaire. L'Etat fédératif est un Etat décentralisé.

Seul l'Etat fédératif permet la justice, l'égalité et l'équilibre dans la liberté : "La société doit être considérée, non comme une hérarchie de fonctions et de facultés, mais comme un système d'équilibration entre forces libres, dans lequel chacun est assuré de jouir des mêmes droits à condition de remplir les mêmes avantages en échange des mêmes services"(Du Principe fédératif, 1863).

(Cependant Proudhon se fait peu d'illusions à propos de la réalisation de son système puisqu'il écrit en 1860 :"Nous marchons à une formation de 5 ou 6 grands empires, ayant tous pour but de défendre et restaurer le droit divin et d'exploiter la vile plèbe ... Il n'y aura plus en Europe ni droits ni liberté ni principes ni moeurs"(Lettre à Beslay, 3 mai 1860).

Ses écrits

  • Qu'est ce que la propriété? (1840)
  • Système des contradictions économiques ou Philosophie de la misère (1846)
  • Le manuel du spéculateur à la bourse (1853)
  • De la justice dans la révolution et dans l'Eglise (1858)
  • La Guerre et la Paix (1861)
  • De la capacité politique des classes ouvrières (1865)
  • Théorie de la propriété (1866)
  • Théorie du mouvement constitutionnel (1870)
  • Du principe de l'art (1875)
  • Correspondances (1875)

Liens externes

Source : Wikipedia

mercredi 16 novembre 2005

Charles de Foucauld, "frère universel"

Charles de Foucauld
Copyright Archives postulation, avec l'aimable autorisation des Petites soeurs de Jesus, de Charles de Foucauld

Biographie

Explorateur du Maroc

Suite à sa rencontre avec Oscar Mac Carty, conservateur de la bibliothèque d'Alger et géographe, Charles de Foucauld élabore le projet de voyage au Maroc. Pour mieux préparer ce voyage, il étudie pendant une année l'arabe et l'Islam ainsi que l'hébreu. Suivant les conseils du conservateur, il se déguise en israélite afin de mieux passer inaperçu dans la grande majorité de ce pays encore peuplé de tribus hors de contrôle direct du sultan et interdit aux chrétiens.

Ce voyage au coeur du Maroc aura lieu de juin 1883 à mai 1884. Charles de Foucauld racontera par la suite son périple en compagnie de son guide, le rabbin Mardochée, dans un ouvrage, Reconnaissance au Maroc, publié en 1888. La masse considérable de renseignements, notamment géographiques et ethnologiques, lui vaudront la médaille d'or de la Société de géographie de Paris.

C'est une révélation : « L'Islam a produit en moi un profond bouleversement. [...] La vue de cette foi, de ces âmes vivant dans la continuelle présence de Dieu, m'a fait entrevoir quelque chose de plus grand et de plus vrai que les occupations mondaines. »

De retour en France, il retrouve les siens, et notamment sa tante Moitessier, sœur de son père, mais la vie parisienne l'ennuie. Il repart à Alger où Mac Carthy lui présente un spécialiste de géographie, le Commandant Titre. Charles rencontre ainsi la fille du Commandant, Marie-Marguerite, avec qui il envisage de fonder un foyer. Plusieurs mois de réflexion et un nouveau périple dans le désert décident de sa vie sentimentale : il choisit de façon définitive le célibat.

La conversion

De février à octobre 1886, il réside à Paris tout près de sa cousine Marie de Bondy (fille de sa tante Moitessier). L'affection de celle-ci et la fréquentation du salon de sa tante lui permet de rencontrer l'abbé Huvelin, vicaire de la paroisse Saint-Augustin. C'est une seconde révélation : « Aussitôt que je crus qu'il y avait un Dieu, je compris que je ne pouvais faire autrement que de ne vivre que pour Lui : ma vocation religieuse date de la même heure que ma foi : Dieu est si grand. Il y a une telle différence entre Dieu et tout ce qui n'est pas Lui... Dans les commencements la foi eut bien des obstacles à vaincre ; mais moi qui avais tant douté je ne crus pas tout en un jour. » L'abbé le convainc d'entrer en religion.

L'année 1887 est consacrée à la correction définitive de la « Reconnaissance au Maroc ». En 1888, l'ouvrage paraît. Fin 1888, il part pour un pèlerinage de quatre mois en Terre sainte jusqu'au début 1889, année de sa préparation religieuse.

Après un bref passage à Solesmes puis à la grande Trappe de Soligny, Charles de Foucauld entre au monastère de Notre-Dame-des-Neiges, situé en Ardèche le 16 janvier 1890, où il prend l'habit de novice et le nom de Frère Marie-Albéric. Après avoir démissionné de la Société de Géographie, il renonce également à son grade d'officier de réserve. « Cette démarche me fait plaisir ; le 15 janvier j'ai quitté tout ce qui m'était un bien mais ils restaient en arrière ces misérables embarras, le grade, la petite fortune et cela me fait plaisir de les jeter par la fenêtre. »

Puis vient un nouveau départ vers l'Orient et la Syrie. Charles de Foucauld rejoint la Trappe de Cheikhlé au mois de juin 1890. Il y restera six années. Cette nouvelle existence cénobitique est faite de méditations ; les moines s'emploient également aux travaux des champs et à la construction de routes. Malgré les réserves qu'il exprime auprès du maître des novices, Dom Louis de Gonzague, au sujet du confort relatif de la Trappe, il prononce le 2 février 1892 ses vœux monastiques et reçoit la tonsure.

Au mois d'octobre 1901, le Père de Foucauld s'installe à Béni-Abbés, une oasis situé sur la rive gauche de la Saoura au sud de l'Oranie dans le Sahara occidental.

Ermite au Sahara

Durant les marches il apprend le tamachek (idiome des Touaregs) et entreprend une traduction de l'Évangile en cette langue. Au cours de l'année 1905, il achève la rédaction des ses Méditations sur les Saints Evangiles.

Les Touaregs vouent rapidement une vénération au « Frère Charles de Jésus ». Il décide de s'y installer pour quelques mois et de passer chaque année trois mois à Béni Abbès, six mois à Tamanrasset, trois mois à aller et venir.

Dix années de recherches aboutissent, en 1915, à la publication d'un dictionnaire linguistique abrégé touareg-français.

Celui qui voulait mourir martyr est assassiné d'un coup de feu le 1er décembre 1916 par des rebelles et pillards senousistes à la porte de son ermitage.

Dans sa dernière lettre à sa cousine Marie de Bondy, Charles de Foucauld écrit : « On trouve qu'on aime jamais assez, mais le bon Dieu qui sait de quelle boue il nous a pétris et qui nous aime bien plus qu'une mère ne peut aimer son enfant, nous a dit, Lui qui ne ment pas, qu'il ne repousserait pas celui qui vient à Lui ».

Le rayonnement spirituel du Père de Foucauld est aujourd'hui perpétué par près d'une vingtaine de congrégations et d'associations religieuses qui proposent de « réapprendre le mystère de l'incarnation aux hommes d'aujourd'hui ».

Le 24 avril 2001, le Pape Jean-Paul II approuve le décret d'héroïcité des vertus du Père de Foucauld qui devient ainsi Vénérable.

Outre sa Reconnaissance au Maroc (1888), Charles de Foucauld a laissé de nombreux documents scientifiques qu'a publiés l'université d'Alger ainsi que ses Écrits spirituels. En 1951, l'imprimerie nationale de France, avec le concours du Gouvernement général de l'Algérie, a publié le dictionnaire touareg-français complet, en quatre volumes, magnifique travail de l'Imprimerie Nationale et somme de travail incroyable de Charles de Foucauld, en vue du bien des Touaregs et plus généralement des Berbères.

La spiritualité du Frère Charles

La vie spirituelle intense de Charles de Foucauld est marquée par plusieurs caractéristiques.

L'imitation du Christ

La vie du Christ est une inspiration fondamentale pour Charles de Foucauld. Plus que Jésus, prophète sur les routes, c'est le Jésus artisan à Nazareth qui lui sert de modèle. Il s'agit de vivre de façon humble : comme Jésus, il faut adopter un mode de vie pauvre, mais plus encore, il faut éviter d'essayer de se démarquer de son prochain. Jésus à Nazareth ne prèche pas encore la bonne nouvelle, il l'incarne. Charles de Foucauld ne voulait pas être une institution, un homme différent, mais au contraire ne désirait que se mêler à la population dans laquelle il exercait son apostolat. Comme Jésus, il voulait gagner son pain quotidien en travaillant de ses mains. Sa prêtrise ne devait pas se manifester comme une fonction supérieure. En conséquence, Foucauld invente un apostolat particulier : l'apostolat du milieu par le milieu (cité dans Paul), par la fraternité.

Un apostolat innovant

Ce n'est pas un apostolat actif. Bien au contraire, Charles de Foucauld refuse de prêcher l'évangile à une population qui ne serait intéressée que superficiellement dans les saintes écritures. En imitant le Christ, Charles de Foucauld espère présenter un modèle de sainteté aux yeux de tous, et ainsi les interesser à son maître, le Christ : en voyant combien ses serviteurs sont bons, ils devaient en déduire la grandeur de leur inspirateur. Le père de Foucauld pronait la fraternité entre les hommes : il donnait tout pour ses « chers nomades », sans rien exiger en retour. La lecture de la biographie de René Bazin entraine une réflexion quant à ses motivations. Il semble que cet apostolat différent était vu comme meilleur, mais aussi plus efficace. Foucauld voyait les limites d'un prosélytisme classique, d'une prêche imposée, sur une population, les Touaregs, restée très indépendante, même vis-à-vis de l'Islam. Connaître la langue, ne pas chercher à s'imposer, afficher d'abord ses qualités, se faire aimer, pour mieux amener à la religion : cet apostolat était effectivement plus porteur.

La famille spirituelle de Charles de Foucauld

L'influence de Charles de Foucauld fut grande : sa biographie, « Charles de Foucauld, explorateur du Maroc, Ermite au Sahara », fut un best-seller (écrite par René Bazin, disponible aux éditions nouvelle cité). Il est considéré comme un des théologiens majeurs du siècle. Une famille spirituelle contribue à répendre ses idées. Il faut citer les petits frères de Jésus, fondés par René Voillaume, et les petites soeurs de Jésus, fondées par petite soeur Magdeleine de Jésus.

Charles de Foucauld, Père de Foucauld, frère Charles ?

Cette question mineure concerne les différents noms désignant Charles de Foucauld : Charles de Foucauld est son nom complet. Il est utilisé pour désigner sa première période, avant son entrée dans les ordres. Père de Foucauld désigne sa fonction depuis son ordination. C'était l'appellation la plus courante. Frère Charles a la préférence de sa famille spirituelle : pour les petites soeurs de Jésus, ce nom exprime mieux son idéal de fraternité et sa volonté de rester humble. On trouve aussi le nom de « petit frère universel ».

Béatification

Charles de Foucauld a été béatifié par le pape Benoît XVI le 13 novembre 2005. Il est en effet crédité d'un miracle, la guérison d'une Italienne atteinte d'un cancer, en faveur de qui il aurait intercédé auprès de Dieu. Lors de la cérémonie de béatification, où furent présents le Pascal Clément et Madame Marie-Laure Le Guay, le pape a déclaré que la vie de Charles de Foucauld était « une invitation à aspirer à la fraternité universelle ».

Source : Wikipedia

Charles de Foucauld, frère universel

"Je veux habituer tous les habitants, chrétiens, musulmans, juifs..., à me regarder comme leur frère, le frère universel. Ils commencent à appeler la maison "la Fraternité", et cela m'est doux."
(Lettre à Marie de Bondy, 7.01.1902)

"Frère", cela s'oppose à une attitude de hauteur ou de paternalisme.

"Universel"... s'oppose à une attitude de repli sur une identité religieuse ou nationaliste... Malgré l'emprise du contexte historique, l'intuition de Frère Charles allait dans ce sens.

En ce début de XXème siècle, la France, convaincue de la supériorité de la civilisation européenne, poursuit ses conquêtes coloniales. A tout le monde, cela paraît normal... et même une chance pour l'évangélisation des peuples ! Charles partage les convictions de ses contemporains sur bien des points! Et en même temps, irrésistiblement, il est poussé vers une autre attitude.

Il s'indigne qu'en Algérie bon nombre d'européens ignorent la population locale et cherchent souvent à en tirer profit. A Tamanrasset il arrive sans arme, il se place sous la protection du chef Touareg qui l'accueille.
Il cherche à améliorer le quotidien des gens par de petits moyens : semences, fabrication de briques, tricot, crochet, médicaments.
Il étudie leur langue avec passion, et se met à l'écoute de leur culture.

C'est un homme pétri par la mentalité d'un milieu social et d'une époque que l'amour de Jésus pour tous les hommes est venu habiter. Et c'est cet homme-là qui a appris, à travers son histoire, à se faire tout petit devant la grandeur d'âme des autres.

Charles de Foucauld n'oublie pas que par deux fois, au Maroc, bien avant sa conversion, il a lui-même été sauvé par l'un de ses hôtes, un musulman, et un juif...
Une lettre écrite en 1903 ( mais restée à l'état de brouillon) montre jusqu'où va son respect pour l'autre.

Il s'adresse à une femme touarègue qui , autrefois, lors d'une bataille entre Touaregs et l'armée française, s'est opposée à ce qu'on achève les blessés du camp adverse, et les a soignés :
" Tous les religieux et religieuses qui entendront parler de vous béniront et loueront Dieu de vos vertus "...
" Nous vous écrivons aussi pour vous demander très instamment de prier pour nous, certains que Dieu qui a mis dans votre cœur la volonté de l'aimer et de le servir, écoute les prières que vous lui adressez... "
( Noté par René Bazin )

Ainsi, Charles reconnaît la manière dont cette femme agit et prie, selon sa propre religion, comme un authentique chemin vers Dieu... Etre " frère universel ", cela va jusque-là... C'est se rendre proche les uns des autres, dans le concret des situations ou des divisions... Charles est à l'écoute de Celui qui a cherché sans cesse à restaurer entre nous les liens de fraternité: Jésus. Il aspire à lui ressembler...

Il sait que plus la ressemblance sera grande, plus il pourra poser des gestes pleins de délicatesse... des gestes où Dieu se donne lui-même... et peut se révéler... quand il veut, comme il veut...

" Ayons cette tendre délicatesse qui entre dans les détails et sait par des riens mettre tant de baume dans les coeurs... "
(Lettre à Marie de Bondy, 16.04.1915)

"...avec certains, sans leur dire jamais un mot de Dieu ni de la religion, patientant comme Dieu patiente, étant bon comme Dieu est bon, aimant, étant un tendre frère et priant ; avec d'autres, en parlant de Dieu dans la mesure qu'ils peuvent porter... "
( Lettre à J.Hours, 3 mai 1912 )

Etre " frère universel "...
c'est défricher, préparer la terre, ...
s'émerveiller du fruit qu'elle porte déjà...
c'est poser le signe
de la tendresse de Dieu pour tous,
et savoir la découvrir à l'œuvre...

Source : Charles de Foucauld, frère universel sur le site Petites soeurs de Jesus, de Charles de Foucauld

Vous pouvez consulter aussi sur leur site le dossier sur Charles de Foucauld ainsi que les pages Amitié et Confiance.

lundi 7 novembre 2005

Robert Schuman - Père de l'Europe

Robert Schuman

Biographie

Robert Schuman (29 juin 1886 à Luxembourg dans le quartier de Clausen - 4 septembre 1963 à Scy-Chazelles) était un homme d'État français.

Sa mère était luxembourgeoise, c'est ainsi que le jeune Robert Schuman fréquenta l'école primaire et secondaire à Luxembourg. Ayant fait ses études supérieures de droit en Allemagne à Berlin, Munich, Bonn et Strasbourg, il ouvre un cabinet d'avocat à Metz en juin 1912. Deux ans plus tard, la Première Guerre mondiale éclate ; Robert Schuman est réformé pour des raisons de santé.

En novembre 1918, l'Alsace Lorraine fête son retour à la France et Robert Schuman entre en 1919 au Parlement comme député de la Moselle. En 1939, une nouvelle guerre éclate et en mars 1940, Robert Schuman est nommé sous-secrétaire d'État pour les Réfugiés. Le 10 juillet 1940, il attribue avec 568 autres parlementaires les « pleins pouvoirs » au maréchal Pétain. De retour en Lorraine, il est arrêté par la Gestapo et mis au secret dans la prison de Metz, puis transféré à Neustadt en Rhénanie-Palatinat le 13 avril 1941. Il s'évade et réussit à rejoindre la zone libre en août 1942 en passant par l'abbaye de Ligugé.

Président du Conseil (1947) (MRP), puis Ministre des Affaires étrangères (1948-1952), il fut le grand négociateur de tous les traités majeurs de la fin de la Seconde Guerre Mondiale (Conseil de l'Europe, pacte de l'Atlantique Nord, CECA, etc.).

C'est à ce titre qu'il proposa, par sa Déclaration du 9 mai 1950, de placer la production franco-allemande du charbon et d’acier sous une Haute Autorité commune, dans une organisation ouverte à la participation des autres pays d’Europe. Cette proposition entrainera la création de la Communauté européenne du charbon et de l'acier qui est à l'origine de l'actuelle Union européenne.

De 1958 à 1960, il est le 1er Président du Parlement européen qui lui décerne, à la fin de son mandat, le titre de « Père de l'Europe ».

Un procès en béatification de Robert Schuman a été ouvert par l'Eglise catholique.

Source : Wikipedia

La déclaration Schuman

Le timbre Robert Schuman

La "déclaration Schuman" du 9 mai 1950, relative à la Communauté européenne du Charbon et de l'Acier, soigneusement préparée avec Jean Monnet et son équipe, illustre bien les finalités de la construction européenne; elle reposait sur un tryptique fondamental : réconciliation, solidarité, paix.

Quelle actualité encore aujourd'hui !

Le texte : Déclaration Schuman

La vidéo : Déclaration Schuman

Son message politique

Voici ce que Robert Schuman, Président au Parlement européen de 1958 à 1960, écrivit, au cours de l'été 1963, peu avant sa mort le 4 septembre, dans l'avant-propos de son livre "Pour l'Europe" :

"Les dures leçons de l'histoire ont appris à l'homme de la frontière que je suis à se méfier des improvisations hâtives, des projets trop ambitieux, mais elles m'ont appris également que lorsqu'un jugement objectif, mûrement réfléchi, basé sur la réalité des faits et l'intérêt supérieur des hommes, nous conduit à des initiatives nouvelles, voire révolutionnaires, il importe -même si elles heurtent les coutumes établies, les antagonismes séculaires et les routines anciennes- de nous y tenir fermement et de persévérer".

Robert Schuman était un visionnaire. Ainsi, plusieurs de ses déclarations se révèlent aujourd’hui, plus de 50 ans plus tard, d’actualité :

« L’Europe, avant d’être une alliance militaire ou une entité économique, doit être une communauté culturelle dans le sens le plus élevé de ce terme. » (Pour l’Europe)

« Une tâche européenne, constructive et valable, consiste sans doute à assurer la défense collective contre toute agression possible. » (Pour l’Europe)

« Nous devons faire l’Europe non seulement dans l’intérêt des peuples libres, mais aussi pour pouvoir y accueillir les peuples de l’Est qui, délivrés des sujétions qu’ils ont subies jusqu’à présent, nous demanderaient leur adhésion et notre appui moral. » (1963)

« L’Europe pourra, avec des moyens accrus, poursuivre la réalisation de l’une de ses tâches essentielles: le développement du continent africain. » (déclaration du 9 mai 1950)

Source : Le message politique de Robert Schuman

Sa maison

La maison de Robert Schuman

En 1926, Robert Schuman achète une propriété conforme à ses goûts, à Scy-Chazelles, un village niché sur le versant du Saint-Quentin, hauteur qui forme la toile de fond du pays messin. On peut aujourd’hui visiter cette maison historique, une demeure, simple et austère, ancrée dans un paysage symbolique d’une grande harmonie.

Elle surplombe la vallée de la Moselle. Celle-ci, depuis la nuit des temps, établit un lien vivant entre des régions et des pays à la fois bien distincts et complémentaires. Le lieu est propice à la méditation. Les aléas de l’histoire se reflètent, en bas, dans les eaux calmes du fleuve.

Le parc de la Maison de Robert Schuman a été en partie transformé en un « jardin des plantes de chez nous» et un jardin d’ombre. Ce jardin fait partie du réseau « Jardins sans frontières ». Il a été mis en place par le Conseil général de la Moselle et le Kreis de Merzig-Wadern.

De l'autre côté de la propriété, à deux pas, au-delà de la rue paisible, s'élève une émouvante église fortifiée, édifiée au XIIe siècle dans laquelle repose le Père de l'Europe.

Source : La maison de Robert Schuman

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le Centre Robert Schumann.

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