mardi 28 février 2006

Pensée de groupe

La pensée de groupe ou GroupThink est un terme inventé par Irving Janis en 1972. Le terme décrit le processus selon lequel un groupe peut prendre de mauvaises décisions ou des décisions irrationnelles. Dans une situation de pensée de groupe, chaque membre du groupe essaye de conformer son opinion à ce qu'il croit être le consensus du groupe. La conséquence en est une situation dans laquelle le groupe finit par se mettre d'accord sur une action que chaque membre du groupe croit peu sage.

La définition originale de Jarvis est :

a mode of thinking that people engage in when they are deeply involved in a cohesive in-group, when the members' strivings for unanimity override their motivation to realistically appraise alternative courses of action.

Le terme rappelle ceux utilisés par George Orwell dans 1984, tel que DoubleThink et NewSpeak.

Autre terminologie: Décisions absurdes.

La pensée de groupe se produit généralement lors de réunions de groupe.

Parmi les mécanismes utilisés par les managers, il est suggéré de placer la responsabilité et l'autorité de la prise de décision finale dans les mains d'une seule personne, vers laquelle les autres se tournent pour avis.

Une autre option consiste à pré-sélectionner une personne qui aura le rôle de s'opposer à toute suggestion présentée, aidant ainsi les différents membres du groupe à présenter leurs propres idées, et mettant en évidence les défauts de raisonnement des autres. L'identification du rôle de cette personne permet de limiter la stigmatisation associée avec le fait d'être le premier à prendre une position négative.

Une autre solution est celle consistant à mettre à disposition un moyen de réponse (feed-back) anonyme (boîte à idée, discussion anomyme en ligne). Les points de vue négatifs ou dissonants pouvent ainsi être exprimés sans que l'individu soit identifié. De cette façon, le capital social du groupe est préservé, puisque tous les membres du groupe ont autant de chance d'être à l'origine du désaccord.

A noter que la pensée de groupe, prenant le pas sur la personnalité de l'individu, trouve son parallèle, sous forme souvent exacerbée, dans les effets de foule.

Voir aussi : Les décisions absurdes.

Source : Wikipedia.

Influence sociale

L' influence sociale ou la pression sociale est l'influence exercée par un groupe sur chacun de ses membres aboutissant à lui imposer ses normes dominantes en matière d'attitude et de comportement.

Définition

L'influence sociale correspond à la modification des attitudes, croyances, opinions d'un individu ou d'un groupe suite au contact avec un autre individu ou groupe. On distingue classiquement trois types d'influence sociale : le conformisme, la soumission à l'autorité, l'innovation.

Le conformisme : l'expérience de Solomon Asch (1952)

- Cette expérience met en jeu un groupe composé de 7 à 9 « compères » (des complices du chercheur) et d'un sujet « naïf » (le véritable sujet de l'expérience). La tâche proposée au groupe est la suivante : il va s'agir de comparer un segment témoin à trois autres, parmi lesquels un seul a la même longueur que le segment témoin.

Comparer la taille d'un segment à 3 autres

Comme on le voit, cette tâche est d'une simplicité enfantine et devrait se solder par une performance avoisinant les 100% pour tous les sujets. Chacun d'entre eux répond à tour de rôle et à haute voix, le sujet « naïf » étant placé en avant-dernière position. On réalise 18 essais ; dans 12 de ces essais, les « compères » donnent une mauvaise réponse de manière unanime. Les résultats montrent que dans cette situation, 33% des sujets « naïfs » donnent une réponse conforme à celle des « compères ».

- Comment expliquer le conformisme ? Dans une situation de groupe, l'unanimité plaide en faveur de l'exactitude de l'opinion exprimée. De plus, généralement, les individus craignent la désapprobation sociale. En résumé, le conformisme s'explique par deux types d'influence : une influence informationnelle (le groupe a raison contre l'individu) et une influence normative (il est plus coûteux de subir la désapprobation du groupe que de se conformer).

- Facteurs influençant le conformisme : ce sont logiquement tous les facteurs qui vont impliquer l'influence informationnelle et/ou l'influence normative (par exemple, la taille du groupe, la difficulté de la tâche, l'attrait du groupe, la confiance en soi du sujet « naïf », etc.).

La soumission à l'autorité : l'expérience de Stanley Milgram (1963)

Cette expérience mesure les limites de l'obéissance à l'autorité. Les résultats de l'expérience montrent que l'absence de sens critique face à l'autorité empêche une majorité d'individu de réagir de manière consciente et volontaire en lui désobéissant, comme ce devrait normalement être le cas quand l'ordre intimé est injuste. Voir la description détaillée de cette expérience.

L'innovation : l'expérience de Serge Moscovici, Elisabeth Lage et Martine Naffrechoux (1969)

- L'expérience se déroule en deux phases : dans la première, la tâche proposée consiste à juger la couleur et l'intensité lumineuse de 6 diapositives bleues. Les groupes expérimentaux sont composés de 4 sujets naïfs et 2 « compères ». Tout le monde donne sa réponse à tour de rôle et à haute voix. Les « compères » répondent soit en position 1 et 2 soit en position 1 et 4 et donnent systématiquement une mauvaise réponse pour la couleur : « vert » au lieu de « bleu ». Les groupes contrôle sont quant à eux composés de 6 sujets « naïfs » qui donnent leurs réponses par écrit. Dans la situation expérimentale, les participants se rallient à la mauvaise réponse donnée par les « compères » dans 8,25% des cas contre 0,25% dans les groupes contrôle. Dans la deuxième phase, les mêmes participants que lors de la première phase reçoivent pour tâche de juger la couleur de pastilles plus ou moins bleues ou plus ou moins vertes. Les résultats montrent alors que dans la situation expérimentale, le seuil de détection du vert était plus faible que dans le groupe contrôle.

- On voit que l'innovation renvoie à un processus d'influence d'une minorité, à l'opposé du conformisme examiné précédemment qui correspond à un processus d'influence majoritaire. Quelles sont les conditions d'efficacité d'une influence minoritaire ? Elles se résument à un mot : la consistance, tant interne (ou intra-individuelle : la personne semble convaincue de ce qu'elle affirme) que sociale (ou inter-individuelle : le groupe minoritaire adopte une position ferme et valide). Le sens commun véhicule l'idée qu'une minorité d'individus ne peut guère influencer une majorité écrasante. La psychologie sociale montre précisément le contraire : tandis que l'influence majoritaire (conformisme) implique un changement temporaire et de façade (je suis l'avis du groupe dans une situation particulière), l'influence minoritaire induit un changement beaucoup plus profond et insidieux et bien sûr plus durable pouvant amener à une conversion brutale (tout commence avec la réflexion courante : « tout de même, ces gens répètent la même chose depuis des années avec une telle certitude, il doit y avoir quelque chose de vrai dans ce qu'ils racontent »). Dans cette optique, les recherches sur l'influence minoritaire prennent tout leur sens : qu'on songe un instant à certains partis politiques extrémistes, minoritaires mais diablement consistants et qui ne cessent de gagner du terrain à chaque élection...

Source : Wikipedia.

L'expérience de la prison de Stanford

L'expérience de la prison de Stanford est une expérience qui visait à étudier l'effet que peut avoir le pouvoir. Les sujets ont été divisés en deux groupes complètement au hasard et des rôles leurs ont été donnés. Les gardiens et les prisonniers.

Elle se déroula durant l'année 1971, à l’Université de Stanford, aux États-Unis.Cette expérience fut menée par le professeur Philip Zimbardo.

Un film allemand réalisé en 2001 met en scène cette expérience, il s'agit de L'Expérience (Das Experiment) qui est représentatif de ce qui s'est passé mais romancé.

L'Expérience (titre original : Das Experiment) est un film allemand réalisé par Oliver Hirschbiegel sorti en 2001. Ce film s'appuie sur le livre de Mario Giordano.

Synopsis du film L'Expérience

Attention : Ce qui suit dévoile tout ou partie de l'œuvre !

Dans le cadre d'une étude comportementale, vingt hommes sont sélectionnés pour une expérience. Huit d'entre eux se voient attribués la fonction de gardiens de prison et douze celle de prisonniers. Les prisonniers se voient attribuer des numéros qui remplaceront leur nom durant l'expérience. Personne ne peut, dans la prison, appeler un prisonnier par son nom, les prisonniers doivent se parler avec leur numéros. Pendant deux semaines, les expérimentateurs étudient les comportements à l'aide de caméras de sécurité.

En quelques heures, les « gardiens » se mettent à prendre leur rôle trop au sérieux, en particulier Berus (Justus von Dohnanyi), deviennent sadiques, et les prisonniers se sentent pris au piège. L'un d'entre eux est un peu rebelle. Son nom est Tarek Fahd (Moritz Bleibtreu) et il a une raison pour agir comme il le fait : il doit effectuer un reportage pour un grand journal. Un autre est colonel dans l'armée de l'air (Christian Berkel), un homme calme et froid qui essaie d'observer ce qui se passe.

Même si la violence est prohibée dans cette prison fictive, les gardiens ne tardent pas à soumettre les prisonniers, plus particulièrement "77", Tarek Fahd, le fauteur de troubles, toujours en tension avec Berus.

Dès la deuxième journée, l'expérience échappe totalement aux expérimentateurs par la révolte des prisonniers et la réprimade brutale des gardiens, menés par Berus.

Un gardien sera même passé à tabac et emprisonné par ses collègues après avoir voulu aider Tarek à communiquer avec l'extérieur.

L'Expérience dérapera totalement lors du départ du docteur Thon par l'emprisonnement des assistants et le cloisonnement total des gardiens.

Voir aussi

Sources : L'expérience de Stanford et L'Expérience (Wikipedia).

vendredi 24 février 2006

Effet Placebo

L'effet placebo (du latin : « je plairai », sous-entendu : « à qui me demande de prescrire... ») est le résultat d'une mesure thérapeutique d'efficacité intrinsèque nulle ou faible, sans rapport logique avec la maladie, mais agissant, si le sujet pense recevoir un traitement actif, par un mécanisme psychologique ou psycho-physiologique. Le Médicament placebo ne contient a priori aucun composé chimique avec activité démontrée.

Dès le début de sa pratique de l'homéopathie, Samuel Hahnemann prescrivait, entre les prise de remède actif, souvent espacées de plusieurs jours, une prise quotidienne de grains de lactoses naïfs de toute autre substance, pour "plaire" au malade et le faire "patienter".

Ce phénomène a été mis en lumière notamment par H. Bernheim (Bernheim H. De la suggestion et de ses applications thérapeutiques, 1886) au cours de ses recherches sur la suggestion, dont le placebo constitue, avec l'hypnose, une des figures majeures. Une des premières mentions du terme se situe dans un dictionnaire anglais médical anglais datant de 1811 : médication destiné plus à plaire au patient qu'à être efficace.

L'effet placebo illustre l'influence du mental sur l'organisme, le psychosomatisme et complique sérieusement l'évaluation de l'efficacité de nouveaux produits. C'est la raison pour laquelle les tests sont effectués par la méthode dite en double aveugle. Celle-ci consiste à composer plusieurs groupes dans lesquels ni le patient, ni le médecin, ne savent si le produit administré est un médicament ou seulement un placebo, permettant ainsi d'avoir un avis objectif sur l'efficacité réelle de la molécule étudiée (pour être mis sur la marché, un médicament doit prouver qu'il est significativement plus efficace qu'un placebo).

En l'absence d'études cliniques en double aveugle probantes, la communauté scientifique considère majoritairement que certaines médecines parallèles, comme l'homéopathie, l'acupuncture et autres aromathérapies relèvent uniquement de l'effet placebo et donc que l'effet de ces thérapeutiques est exclusivement subjectif. Certains travaux de synthèse soutiennent cette opinion dans le cas de l'homéopathie. Une étude menée par un groupe de huit chercheurs de nationalités suisse et britannique dirigés par le docteur Aijing Shang (département de médecine sociale et préventive, université de Berne) a effectué une analyse des publications médicales de 19 banques électroniques, comparant l'effet placebo à l'homéopathie et l'effet placebo à la médecine conventionnelle ; les études portaient en moyenne sur 65 patients (10–1 573). Les résultats de cette étude, publiés dans The Lancet (27 août 2005) n'ont mis en évidence aucune supériorité de l'homéopathie sur l'effet placebo, contrairement à l'allopathie [4].

L'effet inverse existe également, c'est l'effet nocebo. On a ainsi pu observer l'apparition de troubles chez des riverains d'une antenne relais de radiotéléphonie, alors même que l'installation n'avait pas encore été mise en service.

Notons enfin que le placebo ne se présente pas uniquement sous la forme d'un médicament : il peut s'agir d'une opération chirurgicale inadéquate, d'un traitement physiothérapeutique mal conduit ou inutile, et de toute autre intervention thérapeutique dont l'indication est mal pausée, ou la réalisation incorrecte. Tout geste thérapeutique, valide ou non, comporte d'ailleurs une part significative d'effet placebo [5].

Bibliographie

Liens externes

Source : Wikipedia.

mercredi 7 décembre 2005

L'expérience de Milgram

Expérience de Milgram
Le docteur (E) convainc le sujet (S) d'infliger des chocs électriques à un autre sujet qui est en fait un acteur (A). De nombreux sujets continuent à infliger les chocs en dépit des plaintes de l'acteur.

Expérience sur la soumission à l'autorité, menée par Stanley Milgram entre 1960 et 1963, et ayant provoqué de nombreux remous dans l'opinion.

Cette expérience a été mise en scène dans le film I comme Icare, fiction basée sur le meurtre du président Kennedy, avec Yves Montand dans le rôle principal (le film est de Henri Verneuil).

Principe

Le sujet arrive dans un hôpital, il est censé participer à une étude sur la mémorisation qui serait facilitée par une répression (punition) associée à une mauvaise réponse. Pratiquement, l'expérience comporte trois personnages :

  • un comédien qui est censé apprendre et recevoir une décharge électrique, de plus en plus forte, en cas d'erreur,
  • le véritable sujet qui dicte les mots à apprendre et envoie la décharge électrique en ignorant qu'elle est fausse et qui pense donc faire souffrir l'autre,
  • enfin un « docteur » censé représenter le côté officiel de l'expérience.

Au départ, l'apprenant récite quelques mots puis se trompe. Le véritable sujet lui envoie une décharge électrique faible. Au fur et à mesure, la décharge devient plus forte et le sujet apprenant finit par « se tordre de douleur » sur son siège. Le vrai sujet « implore » auprès du « docteur » l'arrêt de l'expérience. Celui-ci, évidemment, lui demande de continuer : c'est dans l'intérêt de la science et c'est dans le cadre d'un hôpital. Le fin mot de l'histoire : jusqu'où le vrai sujet (qui a la perception de faire mal à l'autre) va aller avant de refuser la soumission à l'autorité ? Fascinant et inquiétant...

Résultats

Cette expérience mesure les limites de l'obéissance à l'autorité. Les résultats étonnants de l'expérience montrent que l'absence de sens critique face à l'autorité empêche l'individu de réagir de manière consciente et volontaire en lui désobéissant, comme ce devrait normalement être le cas quand l'ordre intimé est injuste.

L'expérience est renouvelée un grand nombre de fois en faisant varier les paramètres :

  • Éloignement : Le sujet et l'acteur sont placés à des distances variables. Dans le cas de plus grande proximité, les sujets sont face à face et l'acteur supplicié doit volontairement maintenir sa main sur une plaque pour recevoir la fausse décharge. À l'inverse, dans le cas où la distance est plus grande, le sujet ne communique avec l'acteur placé dans une autre pièce que par un système de voyants lumineux. Plus le sujet est lointain, plus l'obéissance est importante.
  • Nervosité : Au fur et à mesure que les sujets infligent des punitions de plus en plus importante, ils montrent des signes d'inconfort et d'angoisse de plus en plus grand jusqu'à leur limite où ils craquent. Certains individus ont appliqué la règle jusqu'au bout sans être troublés, délivrant des décharges jusqu'à la fin du questionnaire alors que l'acteur, invisible au cobaye dans ce cas précis, avait cessé de répondre depuis longtemps. À l'inverse, une femme allemande ayant appris, selon ses propres explications, de son expérience de la Seconde Guerre mondiale à suivre son libre arbitre, refuse de poursuivre l'expérience à partir d'une limite sans montrer le moindre signe d'angoisse.
  • Danger de mort : Dans un certain nombre d'expériences, l'acteur prétend avoir des problèmes de cœur et se sentir très mal au fur et à mesure que les décharges augmentent. Les sujets désobéissent plus rapidement, sauf le cas cité précédemmment qui continue à administrer des décharges à un sujet silencieux.
  • Figure d'autorité : Les scientifiques jouent sur leur comportement et leur habillement pour accentuer leur autorité. Le port de la blouse par exemple a un effet important sur les sujets qui désobéissent moins.

Exploitation

Milgram affirme non seulement que les structures sociales sur lesquelles se fonde le fascisme n'ont pas disparu, mais qu'elles se sont modernisées, gagnant ainsi en efficacité. Il en conclut que l'exercice du libre arbitre est non seulement indispensable sur le plan intellectuel mais qu'il est salutaire dans les faits.

65% des sujets ont été au bout de l'expérience, "administrant" 450 volts à "l'élève". Stanley Milgram a qualifié à l'époque ces résultats "d'inattendus et inquiétants". L'expérience a été reproduite dans de nombreux pays avec des résultats analogues. Hommes et femmes se comportent de manière similaire.

Un point rassurant de l'étude de Milgram est que 10% à 15% de la population semble rebelle à toute forme de pression psychologique, quelle que soit son intensité. Ce même pourcentage avait été observé lors des lavages de cerveau pendant la Guerre de Corée. Les partis politiques comptant entre 5% et 20% de sympathisants (Front National, Lutte ouvrière...) arguent volontiers de ce résultat en présentant leurs sympathisants comme « non conditionnés par les idées ambiantes ». On peut supposer que l'argument serait vite oublié si ces mêmes partis atteignaient les 40% et que leurs idées devenaient les idées ambiantes.

Dans les sociétés industrielles contemporaines, l'accroissement de la population et le progrès technique se traduisent par une perte de sens critique de l'individu qui fait que ces sociétés remplissent toutes les conditions posées à l'exercice du pouvoir autoritaire : « En mettant à la portée de l'homme des moyens d'agression et de destruction qui peuvent être utilisés à une certaine distance de la victime, sans besoin de la voir ni de souffrir l'impact de ses réactions, la technologie moderne a créé une distanciation qui tend à affaiblir des mécanismes d'inhibition dans l'exercice de l'agression et de la violence ».

Georges Bernanos avait déjà fait remarquer en son temps qu' « un soudard pouvait jadis tuer une femme, dix, vingt, sans état d'âme. Mais cent. Mais mille ? La lassitude, à défaut d'écœurement l'aurait empêché de continuer. De nos jours, le pilote d'un bombardier peut déclencher la mort de cent mille personnes par un geste aussi peu chargé émotionnellement que celui consistant à boire une tasse de thé ».

Les sujets sont réduits à la simple condition d'agents, état dans lequel l'individu cesse de se voir comme responsable de ses actions et se considère comme un simple instrument à travers lequel une instance supérieure réalise son plan. On comprend dès lors pourquoi le comportement du sujet se voit si aisément contraint par l'autorité. Dès sa naissance, l'enfant est fortement socialisé selon le principe d'obéissance, à l'école, dans la famille, au service militaire et jusque dans l'entreprise.

Milgram précise à cet égard que « la propension à la désobéissance est d'autant plus grande que le niveau d'instruction augmente ; elle est plus forte chez les médecins, les avocats et les professeurs que chez les techniciens et les ingénieurs ; de même, elle est plus forte chez les protestants et les juifs que chez les catholiques. »

Une autre variante importante dans « l'obéissance acritique » s'est révélée être l'influence du groupe. Ainsi, quand la responsabilité est partagée, elle semble être diluée.

Enfin, selon Milgram, il y a lieu d'ajouter un dernier facteur, l'influence décisive du système industriel, y compris capitaliste - point où il rejoint aussi Bernanos. Les sociétés doivent actuellement faire face à l'alternative suivante :

  • encourager le sens critique de manière à rendre possible une désobéissance consciente et volontaire, avec évidemment les inconvénients que cela représente (revendications sociales plus souvent avancées),
  • ou éduquer a minima des individus qui seront certes formés à bon marché, mais soumis et obéissant à n'importe quel pouvoir à venir, aussi peu éthique soit-il. Ce second futur était pressenti comme presque inévitable par Ernest Renan, qui d'ailleurs le déplorait fortement.

C'est ce que craignent aussi des responsables de l'économie capitaliste aujourd'hui, comme Bill Gates qui décrivait récemment, devant un parterre de Gouverneurs d'Etats américains, les dangers d'un système éducatif nord-américain « obsolète » : dès le 19ème siècle, il était évident que l'école secondaire américaine ne pouvait pas offrir un enseignement de qualité à tous :

  • il fallait préparer une élite à l'université ;
  • il fallait empêcher les autres élèves de traîner dans les rues tant qu'ils n'avaient pas l'âge de travailler aux champs ou à l'usine.

Or ce type d'emploi est en situation de raréfaction aujourd'hui, mais l'école ne s'est pas pour autant adaptée dans les sociétés occidentales dites « modernes ».

Voir aussi

  • La soumission à l'autorité, ISBN 2702104576

Liens externes

Source : Wikipedia